Il voyage pour le compte de Pierre Lazareff (Paris Soir) ; quand le Front populaire arrive au pouvoir, il s’intéresse à Hollywood : Paris-Soir publie plusieurs reportages du 31 mai au 13 juin 1936. Dès lors, « le genre humain peut toujours crever, faute de pain, esclave des machines et sous la coupe des politiciens et des fonctionnaires […] » (LC, p. 195). La tuberculose se développe dans ces « casernes sonores » (BP, p. 369). 34Leurs destins singuliers font l’objet de pages émouvantes, généralement marquées par l’empathie du scripteur. Si Cendrars manifeste constamment son attachement aux plus humbles, aux pauvres, aux mendiants, cette attitude relève moins d’une adhésion à une idéologie bien définie que d’un sentiment diffus d’identification, issu de la guerre, parfois développé selon une mythologie christique chère au poète. Grenouillet, Corinne, et Éléonore Reverzy, ed. 42La déploration devant cette « ruée vers la misère » (HF, p. 339) et les escroqueries immobilières dont sont victimes les pauvres émigrants en banlieue conduit même Cendrars à comprendre sinon à épouser « les justes revendications » des ouvriers qui « ont le droit de vivre et [qui] n’ont rien à perdre » (BP, p. 366-369). On soulignera la bizarrerie de la métaphore de l’étranglement à l’aide d’un fil « étranglent, main sadique » qui saisit ces vers et d’un corps représenté par « ces poteaux grimaçants » qui « gesticulent ». 22Parmi les anathèmes dispensés contre le matérialisme de notre monde moderne, Cendrars critique la volonté de tout dominer, la rationalisation de l’économie ou de la vie humaine (LC, p. 192), l’espoir de créer un paradis sur terre, le « gigantisme » ou la « folie des grandeurs » qui s’exerce à tous les niveaux (tels que : « propagande à l’usage exclusif des masses, dictature du prolétariat, impérialisme » – LC, p. 194), le culte de l’argent (de l’or comme valeur suprême), la croyance dans les bienfaits de la science ou de l’économie politique. En 1913, il fait paraître son poème le plus célèbre, la Prose du Transsibérien et de la petite Jehanne de France. En 1926, il écrit L’Eubage , voyage intersidéral au cours duquel des marins lèvent l’ancre et se rendent dans les parages du ciel : Marquée par le primitivisme et le vitalisme, cette vision du monde est héritée de ses années de formation et de ses maîtres anarchistes. En 1926, il écrit L’Eubage , voyage intersidéral au cours duquel des marins lèvent l’ancre et se rendent dans les parages du ciel : « Les Cahiers Blaise Cendrars » no 6 (en particulier « Une vision de l’homme et du monde » dans la 2e partie). Cendrars y montre comment toute une civilisation, une conjugaison de forces économiques9, a pu l’amener à ce point ultime où l’homme est réduit à être un assassin pour son semblable ; le meurtre individuel a été rendu possible et a été suscité par une collectivité. En isolant chacune de ces perceptions, en les séparant de ce qui les précède et ce qui suit, on ouvre le texte à l’excès poétique de l’image. Sur le point de publier Alcools… De nombreuses pages de L’Homme foudroyé annoncent La Banlieue de Paris. Ainsi les révolutionnaires brésiliens du Fronte Verde en 1936 (Front de Verdure, LC, p. 209) ne sont rien d’autres que des « mécontents », des « broussards ou des bledards » qui ont tout saccagé à Santa Rita de Paranaiba (LC, p. 209) avant que leurs ardeurs ne soient rapidement anéanties par le climat des Tropiques (LC, p. 210). La réponse de Cendrars procède d’un sentiment couramment partagé à l’époque des faits, qui s’appuie – on le voit dans l’ensemble de La Main coupée – sur les « clichés dépréciatifs traditionnels à l’égard de l’ennemi héréditaire7 ». 2 Selon l’expression de T’Sertsevens, ami de Cendrars et écrivain, communément reprise par la critique cendrarsienne. Elle est pourtant inattendue de la part d’un Suisse, dont les ancêtres du côté maternel viennent de Sigriswill dans l’Oberland Bernois (la mère est une Dorner), parfaitement bilingue et excellent connaisseur de la culture germanique. La politique figure comme l’inverse de l’action, maître mot de la constellation idéologique (et esthétique) de l’écrivain, et seule valable à ses yeux. Vivant alors en France, il participe au mouvement d’enthousiasme qui vient soudain balayer les réticences de tous les mouvements antimilitaristes, socialistes ou pacifistes, et « offre son bras » à la France (selon l’expression de l’appel qu’il lance avec le poète Canudo) ; il se trouve enrôlé dans un « régiment de marche des étrangers engagés volontaires » et laisse sur un champ de bataille en Champagne, son bras droit et sa première main d’écrivain. Ne lit-on pas dans une autre partie du Transsibérien : « Pardonnez-moi de ne plus connaître l’ancien jeu des vers comme dit Guillaume Apollinaire » ? La tare suprême qui peut affecter ceux qui réussissent à sortir de la pauvreté est justement de s’embourgeoiser (BP, p. 432). Frédéric Louis Sauser, dit Blaise Cendrars [b l ɛ z s ɑ d ʁ a ː ʁ] [1], est un écrivain suisse [2] et français, né le 1 er septembre 1887 à La Chaux-de-Fonds et mort le 21 janvier 1961 à Paris. 35 Voir Jérôme Meizoz, L’Âge du roman parlant (1919-1939) : Écrivains, critiques, linguistes et pédagogues en débat, préface de Pierre Bourdieu, Genève, Droz, 2001, chapitre III : Du « souffle » au récit de la parole triviale : Blaise Cendrars (p. 283-321). En ouverture, on peut rapprocher ce texte des inventeurs  du vers libre au dix-neuvième siècle (des vers qui ne riment pas), Jules Laforgue qui, avec ses Derniers vers notamment allie vers libres et ironie déjà dans sa poésie. Victime d'une congestion cérébrale le 21 juil… Sur le moment non plus, Cendrars n’a pas offert de textes qui auraient permis une compréhension politique de son engagement, même si J’ai tué, texte écrit en 1918 et qui provoqua une gêne considérable en raison de l’apologie discrète du meurtre qu’on croyait y lire, n’est pas totalement dépourvu d’analyse politique. Le commentaire dilue la question politique dans une vision apocalyptique de la fin du genre humain, anéanti par la guerre (les gaz) ou plus vaguement encore asphyxié, terme dont on se demande s’il faut l’entendre au sens propre ou au sens figuré. 6Du « grand Christ rouge de la Révolution » (dans La Prose du Transsibérien, 1913), jusqu’au souvenir d’une mystérieuse Lénotchka (jeune fille qui aurait été pendue à Viborg : voir LC et HF) en passant par l’épisode révolutionnaire de Moravagine (1926), la Révolution russe figure comme l’arrière-plan d’épisodes d’une vie présentée comme dangereuse6 ; elle alimente le fantasme libertaire et nihiliste de la volée en éclats d’un système contraignant l’individu mais n’est pas associée à l’espoir d’un changement social. Blaise Cendrars (1887-1961) mène d'abord une vie d'aventurier et de bourlingueur avant d'écrire et de publier ses premiers poèmes. Son travail littéraire, de moindre intérêt, prépare la somme des années 1946-194915. 39Plusieurs personnages témoignent de la déchéance sociale inexorable que connaît le parisien conduit à émigrer en banlieue, telle Mme Caroline dans L’Homme foudroyé (HF, p. 353). 32La sympathie manifeste de Cendrars pour le peuple, les humbles, les miséreux semble le rapprocher de l’exaltation populiste, voire communiste, pour le prolétariat. Il reprend la formule de Nerval « Je suis l’autre » et devient le « poète gauche » après l’amputation de son bras à la bataille de Champagne en 1915. C'est là où il a écrit le poème 'La Légende de Novgorode'. C’est le poète qui parle et rassure Jehanne, l’invitant à laisser de côté la mélancolie répété d’un vers à l’autre : « Les inquiétudes / Oublie les inquiétudes » car « ton chagrin ricane ». Selon Michèle Touret, Cendrars visait alors la « bourgeoisie entendue comme ensemble d’individus moyens, heureux de leur médiocrité et dont les préoccupations ne dévient pas de cette béatitude moyenne33 ». Grenouillet, C. 2010. 2La politique apparaît peu dans l’œuvre dernière de Cendrars, et toujours pour y être discréditée, qu’il s’agisse de l’action des hommes politiques ou de la scission du monde en deux blocs antagonistes pendant la guerre froide. 6 Je me réfère ici au titre d’un de ses recueils de nouvelles en 1938 : La Vie dangereuse. 45Les derniers textes de Cendrars assignent à la Grande guerre un rôle de ligne de partage34. 21 Toutes ces affirmations sont rattachées, à rebours de la crédibilité la plus élémentaire, à l’année 1924, date à laquelle Cendrars dit avoir « sent[i] venir tout cela »…. À ses débuts, il utilise brièvement les pseudonymes Freddy Sausey, Jack Lee et Diogène. Deux personnages correspondent à cette définition, les maris de Paquita et de Caroline dans L’Homme foudroyé. 16 Ses reportages parurent dans divers quotidiens entre le 15 février et le 30 avril 1940 (Miriam Cendrars, op. Après trois années de silence, il commence en 1943 à écrire ses Mémoires : L'Homme foudroyé (1945), La Main coupée (1946), Bourlinguer (1948) et Le Lotissement du ciel (1949). Ce mouvement se rapproche du Parti communiste sous l’action d’Aragon. Cendrars a alors réorienté son point de vue sur les événements de 1936. La Prose du Transsibérien et de la petite Jeanne de France est un livre d'artistes publié en 1913 aux éditions Les Hommes nouveaux.Il est composé du poème du même nom de Blaise Cendrars et des couleurs de Sonia Delaunay.. L’écrivain commente les photos de Robert Doisneau en mettant l’accent sur la désespérance suscitée par les « habitations à bon marché » de la banlieue Sud, qui ont remplacé les fortifs détruits, mais n’ont pas fait illusion longtemps : ils servent de cadre à la pauvreté, à la promiscuité, qui entraînent « dégénérescence physique et spirituelle » (BP, p. 366). Les clivages politiques ressurgissent tandis que le rideau de fer s’abat sur le monde. Sa rupture d’avec le roman dans les années 1930 provient de son refus d’une récupération possible de ses thématiques personnelles par une droite tentée par le fascisme (la vie de Jean Galmot, dans Rhum, fut prétexte à la mise en cause, droitière, d’une République corrompue par les affaires), mais aussi d’une fuite « devant des mises en demeure et des obligations d’expression publique éventuelle18 ». La guerre, c’est la misère du peuple. La politique est trucage, combines malhonnêtes. Cette mise en garde prend « à rebrousse-poil les amateurs de littérature engagée27 ». Son œuvre oscille entre :la poésie (la Prose du transsibérienet les Pâques à New-York, 1912) , les romans (l’Or, 1925, Moravagine, 1926)  et les autobiographies romancées (l’homme foudroyé,1945 et la Main coupée, 1946). 51La prose dernière de l’écrivain manifeste une sensibilité inquiète face à l’avenir du monde, doublée d’un pessimisme social et politique total : Cendrars ne croit pas en la validité de l’engagement politique. les poètes en 1913 ne cherchent plus la symétrie du vers mais une forme poétique nouvelle et moderne qui passe par le vers libre. Or la politique a envahi le champ littéraire dans les années d’après-guerre et sommé les écrivains de prendre parti. “Vendémiaire” et “ Zone ” d’Apollinaire ne sont pas sans similitude avec Les Pâques à New-York de Blaise Cendrars. Grenouillet, Corinne. J’avoue qu’il y a de quoi et qu’il est légitime qu’il honore son PC qui siège à la mairie et qui la tient fermement en main, des gais lurons communistes, fins manœuvriers, décidés, qui ne reculeront pas et qui savent ce qu’ils veulent » (BP, p. 424). 1 Blaise Cendrars et Sonia Delaunay, Prose du transsibérien et de la petite Jehanne de France, éditio 1 « L’image simultanée », ainsi nommée par Cendrars et les Delaunay, est caractéristique du moment « moderniste » à son début, entre 1910 et la Première Guerre mondiale. 31Les hommes politiques réels, apparaissent, eux, rarement dans notre corpus, et presque toujours en mauvaise part ; seul Churchill échappe à la condamnation générale pour sa « parole vivante et prophétique » (LC, p. 30) : Blum est montré fessé lors d’affrontements avec le PPF à Saint-Denis (BP), Roosevelt donne dans le « prêchi-prêcha abstraitement démocratique » (LC, p. 30), Reynaud est qualifié de « patron de la sainte Morve » (LC, p. 70). Ils « n’aiment pas les pauvres, les vagabonds, les mendiants », écrit Cendrars (BP, p. 389). Et Cendrars de commenter, narquois : « La Révolution. La période artistique voit fleurir les avant-gardes : le futurisme axé sur la représentation de la vitesse, le cubisme qui représente la réalité sous la forme de figures géométriques, le dadaïsme qui confie à l’art la mission non plus de représenter le monde, mais de le provoquer en cassant les codes bourgeois de la société et la notion d’esthétique. 30 Cendrars féminise le nom des gitans dans L’Homme foudroyé. Elle devint ligue nationaliste et anti-parlementaire et participa aux journées de 1934. Il se projette dans de nombreux doubles qui sont autant de miroirs à la construction symbolique qu’il opère de lui-même dans ses « Mémoires ». ». C’est la ceinture rouge qui bouge. On pourra voir du Céline, ou du Miller, avec une touche de loufoquerie poétique à la Boris Vian, dans ce roman riche de mots rares, plein de cocasserie, qui rend hommage à François Villon. Dès l'âge de 17 ans, il quitte la Suisse pour un long séjour en Russie puis, en 1911, il se rend à New York où il écrit son premier poème Les Pâques (qui deviendra Les Pâques à New York en 1919). ; REVERZY, Éléonore (dir.). C’est indéniablement en tant qu’homme du livre qu’il est désormais perçu4. Le premier, noble vaniteux, fat et bavard creux, édifie une cité ouvrière sur des terrains marécageux qui devient son « fief électoral » ; le châtelain-propriétaire est bientôt élu à la mairie puis au conseil général et enfin à la chambre (HF, p. 320-322). Le “gitane” Sawo, conteur hors pair, double de l’écrivain et personnage offrant un fil directeur dans l’écriture rhapsodique de L’Homme foudroyé, ne peut évidemment être réduit à son appartenance sociologique, encore moins à une quelconque signification politique. Ils expriment sa nostalgie de l’ancien monde populaire, artisan ou ouvrier, altéré par la guerre. Dès seize ans, il fugue vers la Russie, premier voyage d’une longue série d’aventures qui le mènent dans le monde entier. C’est la musique dissonante du train qu’entend le lecteur, ce « broun-roun-roun des roues ». La tétralogie fait ainsi perdurer une représentation de la politique forgée dans les années 1910-19303, où le rapport au peuple et à la question politique relève de l’émotionnel, de l’irrationnel, de l’affectif, et non d’une forme d’engagement partisan, posture violemment décriée par l’écrivain. 29 Blaise Cendrars, Moravagine [1926], Œuvres complètes, Denoël t. II, 1961, p. 385. Il n’est pas non plus un “auteur Gallimard” en vue. « L’actualité de demain » (1937) regrettait déjà que la Révolution russe s’appuyant sur la « raison raisonnante » ait prétendu édifier un état socialiste : « Le rôle de Moscou était de détruire et non pas de se mettre à construire20 ». S’ajoute à la divergence de conception du rôle de l’écrivain dans la Cité, le conflit de générations qui oppose Cendrars (né en 1887) à la génération d’Aragon de dix ans son cadet, de Sartre plus jeune de 18 ans, ou de Camus, dont 26 ans le séparent. Il a commençé à écrire des poèmes lorsqu'il vivait à Saint-Pétersbourg. C’est à ça qu’aboutit toute cette immense machine de guerre. Celui-ci n’apparaît jamais que sous les auspices du politicien, spécialiste des magouilles et des « atermoiements » qui est le « don des politiciens en République » (HF, p. 372). Ce poème est considéré comme un manifeste de la poésie moderne. Les minerais viennent du Chili, les conserves d’Australie, les cuirs d’Afrique. « Lettera », 1977. 3Depuis plus de deux décennies, la critique cendrarsienne a mis l’accent sur la dimension esthétique, identitaire et symbolique de l’œuvre de Cendrars. Ici, rappelons-le, le poème est dialogique : c’est une conversation entre le poète, alter ego de la personnalité hâbleuse de Cendrars, et la petite Jehanne. C’est la vitesse du train qui est la réponse aux inquiétudes que formule Jehanne. […] L’expérience de plusieurs civilisations. 23 Voire « Rotterdam » dans Bourlinguer et LC, p. 30. L’ « orage » que constitue le poème est résumé dans le pronom personnel « nous » qui en englobe tous les mots. A noter que l’ensemble du poème est en vers libres, cad en vers hétérométriques et sans rimes systématique. cit., p. XI-XII. Les hommes politiques sont des fripons, dont sont victimes de pauvres gens dupés. Le cadre plus général d’une politisation excessive du champ littéraire, sinon de la Littérature, permet de mesurer l’originalité (et la marginalité) de la position de Cendrars dans les années d’après-guerre. 5 Blaise Cendrars, Le lotissement du ciel, Paris, Gallimard, coll. Ça oui. Cendrars se livre à un renouvellement du lyrisme musical dans lequel règne le « faux accord ». 5 Voir « L’actualité de demain » dans Histoires vraies [1930], Œuvres complètes, Denoël, t. III, 1960, p. 428 et Miriam Cendrars, Blaise Cendrars, Balland, 1984, p. 587. 28 Claude Leroy, préface citée, p. XI-XII. Cendrars … L’exode et la transplantation de Parisiens dans des pavillons hâtivement construits est, dit-il, « un des spectacles les plus décourageants qu’il m’ait été donné de voir dans ma carrière mouvementée de reporter » (HF, p. 341-342). Poétique de la vitesse Au gré de cette poétique polyphonique et cadencée, le modernisme cubiste ou simultanéiste s'allie dans la souplesse du vers libre aux échos du symbolisme et aux images du Douanier Rousseau, dans un tressaut de roues mécaniques où se confrontent « la prose lourde de Maeterlinck », Moussorgski et les lieder de Hugo Wolf. Le Transsibérien  est le « le premier livre simultané » en accordéon. La grande période romanesque des années 1920-1930 témoignait déjà du virulent rejet du mode de vie et des valeurs bourgeois. 7Cendrars a su pourtant s’engager au sens fort du terme en 1914. 18Cet excentrement a été un choix constant dans l’itinéraire esthétique et politique de Cendrars. Le Cendrars des années 45-50 n’est pas devenu l’anti-communiste résolu que laissait présager sa proximité idéologique avec l’extrême droite des années trente. Certaines notations sur le prolétariat de la banlieue rouge peuvent ainsi surprendre sous sa plume : « Aujourd’hui, le prolétariat de Saint-Denis est le plus fier du monde. Or, rappelle Michèle Touret, dans L’Unique et sa propriété (1899) Stirner « compare la société à une prison car le sujet qui s’y trouve ne détermine pas les relations qui s’y manifestent22 ». Cendrars cloue au pilori ceux qui craignent la Révolution et la Ceinture rouge, tel cet homme qui, en 1937, déclarait à sa femme : « Mimi, réveille-toi. 14 Myriam Cendrars, fille et biographe de l’écrivain, cite un extrait de ce texte (figurant dans les archives Cendrars de Berne) dans sa biographie de 1984, mais le raye de sa version de 1993, comme si elle entendait laver son père d’un possible soupçon d’antisémitisme. Non seulement les usines empoisonnent l’atmosphère, mais elles sont source de nuisance sonore (« tintamarre », BP, p. 386) ; plus qu’un autre, le « travail industriel est maudit » (BP, p. 426). Les pointes polémiques s’appuient aussi sur ces antagonismes anciens, d’ordre esthétique. In Grenouillet, C., & Reverzy, É. Problématique et découpage du texte en mouvements : Comment la modernité des vers figurent-elle le voyage hallucinatoire du poète dans le transsibérien ? Vérifiez si votre institution a déjà acquis ce livre : authentifiez-vous à OpenEdition Freemium for Books. Dès lors que les hommes du peuple obéissent aux mots d’ordre des « émissaires du Kremlin » (BP, p. 425), qu’ils se syndiquent, se groupent, revendiquent, ils adhèrent à cette modernité matérialiste détestable qui va conduire le monde à sa perte et font évidemment fausse route. Il adoptait le style rapide, pas débraillé, mais raccourci, fonçant à toute vitesse vers l’essentiel. », Mais oui, tu m’énerves, tu le sais bien, nous sommes bien loin. Blaise Cendrars, de son vrai nom Frédéric Louis Sauser, est né en 1887 en Suisse. 31 Philippe Roussin, Misère de la littérature, terreur de l’histoire : Céline et la littérature contemporaine, Gallimard, coll. Dans ses textes consacrés à la banlieue, l’écrivain s’attache à dénoncer la misère avec une virulence presque politique : sur des terrains voués à la spéculation immobilière et lotis de constructions anarchiques se sont rués des milliers de transplantés qui connaissent des vies sordides. On sait que Cendrars adolescent, mauvais élève, est envoyé faire un apprentissage chez un joailler en 1905 à l’âge de 16 ans. Ce peuple abstrait, mythique, mal déterminé, laisse place, dans notre corpus, à un ensemble d’êtres mieux définis. Nos éditions de référence sont : L’Homme foudroyé [1945], Denoël, coll. Études orientales, slaves et néo-helléniques, Recherches croisées Aragon / Elsa Triolet, Par auteurs, Par personnes citées, Par mots clés. Le ciel (encore une fois un topos de la poésie) est « plombé » cad bouché, symbolisant l’absence d’avenir. GRENOUILLET, Corinne (dir.) 19Sous sa plume, le refus du politique prend la forme d’énoncés sentencieux, d’anathèmes ou de diatribes plus ou moins développés, identifiables dans l’ensemble du corpus. En banlieue nord, les lotissements sont imbibés d’eau, le décor industriel désespérant (BP, p. 418). 16À partir du 14 juillet 1940, Cendrars s’installe à Aix-en-Provence où il vivra jusqu’en 1948. 49Cendrars est un écrivain de tout premier plan, qui ne saurait toutefois être réduit à l’image appauvrie qu’une sélection de passages trop ouvertement idéologiques pourraient donner de lui. En partance pour une journée de travail, j’emmène avec moi le fameux texte de Blaise Cendrars, si célèbre pour la modernité poétique qui en émane. Cela a tendance à montrer son irrévérence envers la musicalité classique de la poésie qu’il congédie en optant pour le vers libre. 35Dans La Banlieue de Paris, Cendrars rappelle que tous les hommes de son escouade pendant la guerre étaient issus des quartiers populaires de Paris. La question, qui revient dans le poème, sert de leitmotiv au poème déstructuré et prend la forme d’une ballade avec le retour de ce refrain. Ils entraînent le lecteur dans un voyage cosmopolite imaginaire sans début ni fin (Montmartre, Moscou, Kharbine, Bâle-Tombouctou, Babylone, Montmartre, Auteuil, Patagonie, Bornéo, Paris-New-York …).La poésie surréaliste de Cendrars s’exprime à travers une réécriture de la mélancolie, motif traditionnel de la poésie ici revisité par le poète. 3 On se référera aux travaux de Michèle Touret, Blaise Cendrars et le désir du roman (1920-1930), Ch 2 La politique apparaît peu dans l’œuvre dernière de Cendrars, et toujours pour y être discréditée, qu’il s’agisse de l’action des hommes politiques ou de la scission du monde en deux blocs antagonistes pendant la guerre froide. Rien ne semble susceptible d’évoluer : « […] ici dans cette banlieue parisienne, […] la misère imprègne tout et pue comme la première fois où j’y ai mis les pieds » (BP, p. 379). Bardamu vit en banlieue, y exerce la médecine comme Céline lui-même, lequel avait aussi trouvé une place originale dans le champ littéraire en s’excentrant et en se présentant non comme écrivain mais comme un médecin de banlieue vivant au contact du petit peuple, loin de tout académisme. Voir Philippe Chardin, Le Roman de la conscience malheureuse : Svevo, Gorki, Proust, Mann, Musil, Martin du Gard, Broch, Roth, Aragon, Genève, Droz, 1982. Blaise Cendrars figure poétique des avant-gardes du début du vingtième siècle marquera son époque par ses fulgurances poétiques modernes, de la même manière que son camarade Guillaume Apollinaire avec le poème Zone 11Dans les années vingt, Cendrars a rompu avec l’esthétique de la main droite, selon l’expression de Claude Leroy. 46Ces « hommes libres » d’autrefois (HF, p. 220), ces « petits gars indépendants », souvent des compagnons du tour de France, sont le type d’ouvriers que célébraient Henry Poulaille et les écrivains prolétariens proches de l’anarchosyndicaliste dans les années trente… alors même que cette catégorie socio-professionnelle avait déjà en grande partie disparu au moment de l’écriture, cédant la place aux ouvriers d’industries. [Présentation du texte] Dans La Prose du Transsibérien, le poète se souvient de sa découverte émerve… Parce que je déteste les Boches.– Vous n’êtes pas logique avec vous-même, Blaise Cendrars.– Heureusement ! 9 « Me voici l’eustache à la main. Jusqu’à la déclaration de guerre, sa production littéraire est essentiellement constituée de reportages-nouvelles publiés dans cette grande presse de droite et d’extrême droite ; Cendrars assoit sa réputation de conteur d’« histoires vraies », souvent rocambolesques, toujours étonnantes. Dissertation sur la beauté baudelairienne, Dissertation sur le lyrisme sur les Fleurs du Mal, La rencontre au bal dans la Princesse de Clèves, les mots rares (réminiscence du symbolisme), les couleurs et les matières (goût par l’abstraction naissante), les inventions comme les moyens de locomotion (mouvement futuriste comme le poème « Zone » d’Apollinaire). Connu du grand public comme écrivain du voyage, grand reporter, conteur à la faconde inépuisable, Cendrars apparaît désormais comme un écrivain du secret, à l’écriture complexe et parfois ésotérique, où l’intertextualité la plus sophistiquée est mise au service de vastes constructions pseudo-autobiographiques. « nrf essais », 2005, 754 p. 32 Voir dans La Banlieue de Paris, les photos respectivement légendées : « La nouvelle génération (Arcueil-Cachan) » (p. 367) et « Les petits poucets qui vont au lait » (p. 368). Le problème de cette conception de la temporalité proprement poétique appliquée au présent moderniste dans la poésie d’Apollinaire, Cendrars et Reverdy est que le temps vertical « bouleverse le temps même de la vie », comme La guerre froide sévit, coupe le monde littéraire en deux : communistes et compagnons de route, jdanovisés, s’enferment dans un ghetto politique et éditorial.

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